Batman (1966), Leslie H. Martinson

MV5BMTkzNDY5NTg5MF5BMl5BanBnXkFtZTgwNzI4NzM1MjE@._V1_UY1200_CR151,0,630,1200_AL_Batman dépressif comme jamais vient tout juste de réunir la Justice League pour un résultat quelque peu bancal dirons-nous… En même temps ça lui pendait au bout du nez tellement la tristesse l’envahissait depuis ces dernières années avec son passage entre les mains d’un Nolan novateur et sérieux (que j’ai dans l’ensemble apprécié. oui oui même ce troisième opus boudé, Tom Hardy for ever les amis). Mais quel triste constat… plus aucune place à un sourire innocent sur le visage ; ce n’est que déprime, ténèbres et autres sombretés dans l’univers de la chauve-souris. Pourtant on se rappelle innocemment notre enfance et ses croquignolets souvenirs colorés. Schumacher nous donna de quoi rêver entre Freeze, Double Face, Robin et Batgirl, ses décors fantastiques néons & brumeux et son Batman aux tétons pointants… quoi qu’encore un peu trop sombre pour les plus vieux d’entre nous qui se rappellent avec délectation Adam West et Burt Ward distribuer gnons et POW en pagaille. C’est donc avec un plaisir à peine dissimulé et presque coupable (je dis bien presque parce que j’assumerai toujours tous mes visionnages) que je suis allé regarder cette bobine et effectuer un travail archéologique des plus cocasses et divertissants. Gotham (6)66 ouvre moi tes portes !
Malgré un côté clairement plus light du film, les enjeux n’en restent pas moins importants à Gotham city car notre duo masqué ne tient pas tête à un ou deux super vilains, mais bien à quatre qui veulent assouvir une fois pour toute leur désir de conquête du monde. The Riddler, Joker, Penguin et la charmante Catwoman. Et pour se faire un plan des plus ingénieux : kidnapper le milliardaire Bruce Wayne pour amener Batman à se montrer et l’anéantir pour ensuite s’attaquer au siège des Nations Unis. Évidemment nos justicier déjoueront ce complot avec autant d’ingéniosité que leur matériels de pointe et leurs intellects sur-développés leur permettront. Mais ce n’était pas gagné d’avance et on pourrait même dire que c’était un peu laborieux.

En dressant ce semblant de synopsis nous ne sommes même pas à des années lumières du divertissement BIGGER than life que le film réussira à me donner. Car si le pitch est assez simple, le film rentre dans une complexité cartoon hors norme, alternant entre dialogues enflammés croustillants et un enchaînement de situations toutes plus connes et farfelues les unes que les autres ! À commencer par la scène d’ouverture où, après un appel du Commissaire Gordon aussi inactif qu’une carpe hors de l’eau, Batman et son fidèle acolyte Robin partiront sauver un yacht à la dérive. Quelle surprise quand ce Yacht disparaîtra aussi subtilement qu’un Houdini sous leurs yeux ébahis et se transformera en requin mangeur d’homme. Constitué d’autant de plastique que les pares-chocs de la Miss Kardashian, le sélachimorphe (et ouais on en apprend tous les jours) se tient prêt à faire de la chauve-souris son quatre heure. Pas de panique. Même si en apparence Batman a l’air en difficulté, en témoigne ses coups répétés dans la face, Robin est à la rescousse en effectuant un numéro d’équilibriste des plus palpitant avec LA solution : le spray anti-requin… Un spray qui fera tout bonnement exploser le cachalot ! Y a pas à dire, les badguys n’y vont pas avec le dos de la cuillère et attaquent super fort d’entrée de jeu. À peine dix minutes que la bobine est commencée et on se dit déjà qu’on en a pour notre argent et qu’on n’a pas mis les pieds n’importe où !

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Et ce n’est que le début, car le film déploiera une toile de situations toutes aussi bonnardes les unes que les autres. Comme les grands instants Sherlock de Batman totalement tirés par les cheveux. Beaucoup trop complexe pour le retranscrire ici je prendrai des raccourcis ultra faciles : il comprendra laborieusement qu’il aura à faire à nos quatre mousquetaires du mal après l’attaque du requin…car un Requin vient des océans et comme on le sait le pingouin aussi… bim c’est fait le Penguin est dans la partie. Mais ce ne s’arrête pas là car à travers ce jeu tout ne semble être qu’une simple farce… Vous l’avez deviné aussi c’est égal au Joker. Et pour finir comme c’est une énigme qu’ils sont en train de résoudre en direct donc le Riddler est forcément complice… pfiou ils ont le cerveau qui fument pardi ! D’ailleurs le Riddler donnera du fil à retordre à nos héros avec ses nombreuses énigmes tellement simplistes et capilotractées qu’il en est impossible, si ce n’est Batman, de les résoudre. Enfin bref vous avez compris, il y a pléthore de situations identiques dans le métrage qui, faute d’être efficaces dans le plan d’anéantir le Batman, nous divertiront plus que de raisons. Je passerai la scène où Batman, aimanté sur un dispositif de métal du fait de sa ceinture qu’il pourrait évidemment enlever, préférera inverser la polarité de missiles à tête chercheuse pour les faire exploser à deux pas de sa face…Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Mais notre homme aime le challenge et trouvera cette solution parfaitement adaptée jusqu’à que cette dernière tombe en rade de batterie (pour un justicier il est bien à court de moyen). Il s’en sortira bien entendu, mais ce coup-ci sauvé par une âme charitable qui se sacrifiera pour lui laisser la vie sauve : un dauphin. Oui oui vous avez bien lu, un dauphin se jettera sous la roquette pour laisser la vie sauve au Batman. C’est mignon et émouvant et donnerait presque la larme à l’œil.
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On pourrait aussi s’attarder encore sur la magnifique scène où Bruce Wayne tombe sous le charme d’une Catwoman subtile sous déguisement de journaliste russe. Une scène folle où Alfred au volant de la Batmobile (même avec ce masque de Zorro dure de tomber dans la supercherie) zieute le rencard de son employeur. Un peu pervers me direz-vous, et vous avez raison. Robin est du même avis quand il comprendra que Bruce est bien chaud ce soir et que ça va dépasser le politiquement correct. On éteint donc tout malgré la tristesse évidente du creepy Alfred qui rate le spectacle. Évidemment on se moque d’Alfred qui n’est là que pour être témoin du fait que son petit protégé va enfin pécho, mais il avait raison le loustic. Car ce rencard sera la première étape du piège visant à écarter Batman. Je n’en dévoilerai pas plus mais vous avez compris l’idée.

Enfin bref, ça part vraiment dans tous les sens. Entre les déductions aussi surprenantes que stupides (le chef des armées aurait vendu un sous marin nucléaire à un homme sans adresse nommé P.N. GUIN… tu m’étonnes que Batman soit remonté contre lui), les scènes d’actions interminables et débordantes d’ingéniosités scénaristiques et l’enjeu critique du plan machiavélique des antagonistes, on a de quoi se régaler d’un festin gargantuesque. Mais ça ne s’arrête absolument pas là, car nous n’avons qu’effleuré l’iceberg et le film prend encore une toute autre saveur quand on tombe dans le repère de nos badguys ! Inversant nos codes actuels du Vigilante de la nuit, ça sera le Joker et le Penguin qui seront d’une connerie sans faille…à l’image de leurs psychés en réalité, puisque le clown ne fera que des blagues, et l’autre matelot ne sera que le fournisseur en matériel pour l’équipe. Le niveau ne sera relevé que par le Riddler, qu’on comprend très vite qu’il a un peu plus dans le crâne (mais surtout tellement caricatural qu’il tapera vite fait sur le système le margoulin), et la Catwoman qui campe la femme forte de l’équipe qui ne bougera que rarement le petit doigt. Enfin si ce n’est que pour se faire chauffer la croupe comme il faut par un Bruce Wayne lover et chaud comme la braise. Même s’il faut mesurer nos propos, ça ne sera qu’une bande de bras cassé à l’ingéniosité du Coyote chassant Bip Bip qui n’espèrent réussir que parce que le Batman et Robin ont l’air de bien ramer aussi de leur côté.

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Méchants caricaturaux au possible et détectives roi des évidences pour les contrer. Que reste-t-il à ce film qui m’a tout l’air d’en avoir sous le capot ?
Toute la vertu morale au film évidemment à travers un Dick « Robin » Grayson plus que borderline ne voulant que dézinguer gratuitement du citoyen (on commence déjà à comprendre pourquoi il prendra son envol solo en tant que Nightwing). Grâce à lui on a le droit à de belles maximes plus qu’inspirantes. Robin hait tellement le bas peuple qu’on se dira que les longues années au Manoir Wayne lui ont trifouillé le ciboulot. Et quitte à choisir la facilité et faire un sacrifice quand Batman tient une bombe énorme dans les bras, il voudra sans hésiter faire sauter un bar rempli de piliers alcooliques qui ne trouvent ici qu’un réconfort dans leurs misérables vies… Ce ne sont que des alcooliques se défendra t-il…Bah oui, pourquoi mériteraient-ils de vivre si ils ne font que boire ? Mais Batman, qui se démènera corps et âmes pour qu’il n’y ait aucune victime, le remettra dans le droit chemin « Maybe drunkers Robin but they are human beings ». Amen. Et ce n’est qu’une morale parmi tant d’autres, car le film m’aura finalement appris qu’il est bien mal de jouer à Dieu, qu’il ne faut pas faire n’importe quoi avec ce qu’on ne connaît pas et qu’il ne faut pas changer le cours naturel des choses. Merci Batman et surtout merci Robin de pointer l’erreur.
batman1966mUn film ma foi plaisant que ce premier long Batman, réunissant aussi des ingrédients classiques du mythe, comme la romance (sous exploitée) de Batman et Catwoman et le côté vraiment evil des méchants qui n’arriveront jamais à totalement s’unir contre un but commun, préférant se tirer dans les pattes et se foutre des taquets que de mettre de côté leur fierté pour triompher. C’est aussi toujours un petit plaisir coupable que d’entendre une déclinaison des insultes Holyesques du Robin aussi imposantes que les insultes du Captain Hadock de Tintin. Ainsi que Pow et CABOUSH diverses. On regrettera quand même l’absence de Julie Newmar derrière le masque de Catwoman même si Lee Meriwether n’est pas honteuse…mais pas la même saveur si vous voulez mon avis.

Au final le film est littéralement complètement con, mais tellement bonnard à regarder ! Aujourd’hui le pégu lambda le pointera direct du doigt en le traitant de nanard, invoquant le fait qu’il est nul, même s’il a quand même rigolé devant (justification sur le fait qu’il l’ait quand même regardé). Et je lui répondrais un fuck off en bonne et dû forme. Car oui le film pourrait être nul, mais avec ce charme millésimé années 60, une décennie parfaite pour traiter du comic book, avec ses couleurs flashy et son grain particulier (un peu le charme Star Trek) et ce bon spirit comique je m’en-foutiste, il passe totalement tout seul. Oui c’est cheap (épée en plastique qu’on ne prendra pas la peine de cacher, choré’ très acrobatiques), oui le film a quelques longueurs et fait quelques fautes dans des scènes qu’on a du mal à prendre au sérieux (quand Batman se rendra compte que son amour russe et Catwoman ne font qu’un). Mais à aucun moment il n’a la prétention de se prendre au sérieux et il retranscrit le côté kitch du comic book des débuts de la chauve-souris à la perfection. Et il faut le dire, le film est bien réalisé. Là où Crimewave se plantait lamentablement en étant toujours dans la surenchère et surtout en ne laissant à aucun moment le spectateur respirer, lui prend plus son temps et arrive à être dans la mesure pour en faire un bon divertissement. Le rythme est soutenu, mais c’est bien fait ! Et comme dirait Burt Ward « It’s clean and a wonderful entertainment for the family ! ». Un Batman grand public, décontracté et drôlement plaisant. On ne lui en demande pas plus !

Howard Bartleh

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